• L'apparence...

    J'ai du mal avec la beauté. Clairement. Chez moi, personne n'est beau. Personne n'est moche. J'imagine que ça explique pourquoi je n'ai jamais éprouvé le moindre coup de cœur pour un homme. Pourquoi j'ai toujours été foncièrement incapable de faire un compliment. Je remarque les détails, une nouvelle coiffure, un vernis à ongle original... J'approuve la nouveauté, l'originalité, mais pas l'esthétisme. Parce que je ne le vois pas.

    Et du coup, conséquence logique et prévisible, ma propre apparence est quelque chose qui m'indiffère un peu. Attention, je suis maniaque sur certaines choses, les cheveux, la peau, ce genre de trucs, mais ça reste une préoccupation "sanitaire" et rien de plus.

     

    Ces derniers temps, je me suis efforcée d'analyser le rapport biscornu que j'avais avec ma propre image. Mon poids, notamment. Si on s'en fie à Mister IMC, je ne suis pas seulement ronde, je suis en "surpoids avéré", c'est limite si le machin ne m'inviterait pas à commander dare-dare un cercueil ! Si on en croit ma mère, je suis carrément trop grosse (ah, la délicatesse maternelle...). Je ne suis pas aveugle. Je sais que j'ai des kilos en trop. Je mesure 1,57 mètres. Je fais présentement 67 kilos, j'en faisais 75 il n'y a pas si longtemps. Je mets du 42/44. Et ?

    Avoir honte de son poids ? pas pour moi !Bah rien. D'ailleurs, ça surprend toujours énormément (sans jeu de mot) les gens quand j'annonce franchement mon poids et ma taille de vêtements. Bah... Pourquoi je ne le ferais pas ? Je ne vais pas jouer la carte du secret d’État, le premier anonyme venu qui me croise dans la rue va forcément remarquer que je ne suis pas un squelette ambulant. Et puis...je n'ai pas honte. J'assume. Enfin, non, pour dire les choses comme elles sont, ce n'est pas seulement ça. Je crois qu'au fond, ça ne m'intéresse pas. Je suis ronde ? Et puis ? Je ne mange pas n'importe comment, j'ai un appétit de moineau, je marche entre deux et trois heures par jour. J'estime que j'ai un mode de vie plus sain que celui de 80% des gens qui m'entourent, qui avalent pizza sur pizza en passant leurs après-midis devant un programme abrutissant. Alors oui, malgré ça, je suis ronde. Qui est le coupable ? Une génétique antipathique ? Une alimentation moins équilibrée que je ne le crois ? Quelques mauvaises habitudes, comme mon apéro quotidien le soir ? Un peu de tout ça, je pense. Au fond, la réponse m'indiffère un peu.

     

    Anecdote rigolote : il y a dix ans, je faisais  72 kilos. Et pour une raison bizarrement explicable, un jour, j'ai décidé de maigrir. Sans faire de régime draconien, mais en supprimant tout le superflu, et surtout en faisant une à deux heures de sport intensif tous les soirs, sans exception. J'ai perdu 10 kilos. D'ailleurs, Mister IMC me disait encore que j'étais trop grosse, que mon poids idéal devait tourner autour des 53 kilos (seriously? Je vous dis qu'il veut ma mort, ce bidule !)... Autour de moi, je ne récoltais que des compliments. Et des questions avides de gens pressés de connaître la formule magique. Je faisais du 40, parfois même j'arrivais à entrer ma couenne dans du 38 mal taillé. Tout le monde était content pour moi. Sauf moi. Pourtant, l'initiative venait de moi, mais...avec le recul, je me rends compte que ce n'était pas si simple. j'essayais juste de rentrer dans une norme. Ayant toujours traîné une étiquette de différence "comportementale", je n'acceptais pas l'idée d'en avoir une autre, une différence physique, visible au premier regard, identifiable en deux secondes. Ma décision n'était pas ma décision, au fond, c'était juste une tentative inconsciente de coller "au moule". De tromper l'ennemi, en somme. De parader sous un faux masque de normalité. Cela, je ne m'en suis pas rendue compte de suite. Il a fallu que je reprenne mes fameux dix kilos perdus et que je mûrisse intérieurement pour le réaliser.

     

    Heureusement pour moi, je n'avais pas fait de régime extrême, j'ai évité l'effet yoyo tant redouté. J'ai repris mes kilos petit à petit. Suite à une méchante cruralgie qui m'a laissée boitillante pendant deux mois, j'ai été obligée de dire adieu à mes séances de sport quotidiennes. Fini le stepper et le vélo d'appartement. J'ai repris un, puis deux, puis trois kilos. Et j'ai réalisé quelque chose de bizarre : finalement, je me sentais mieux ! J'étais en accord avec moi-même, je me sentais "vraie", et quand je me regardais dans la glace, je ne voyais pas juste une coquille vide, une enveloppe superficielle, je me voyais MOI. Je ne portais plus ce masque étrange que les autres semblaient apprécier, et je ne m'en sentais que plus libre.

     

    Je suis donc revenue à ce "surpoids" que tous les magazines diabolisent. Dans ma tête, il y a une limite très claire que je ne veux pas franchir, et c'est pour ça que je refais attention à mon alimentaire, et que je suis repassée sous la barre des 68 kilos... Je vise les 65 kilos, peut-être les 63 si mon corps le tolère. C'est ma seule limite, qui n'a rien à voir avec un quelconque souci d'apparence, mais qui est juste, encore une fois, une considération bêtement sanitaire. J'ai une activité physique régulière et contrairement aux idées reçues sur les "ronds", je ne suis pas du genre à engloutir une tablette de chocolat en un quart d'heure. Dans mes placards, il y a encore des chocolats de 2013. Pour dire. Je prends un sucre par jour, pas plus, pas moins. Le matin avec mon lait nature. Bref, d'une certaine façon, je fais attention, mais pas pour une raison esthétique. Je m'en fiche d'avoir des rondeurs. De ne pas être "conforme à la norme". Parfois j'entends un petit ricanement sur mon passage. Et ça me fait limite sourire. Car celui qui ricane de la différence de l'autre se croit fort, alors qu'il est faible, soumis à la pression sociale, formaté pour des normes qu'il s'efforcera d'atteindre toute sa vie. Tout sauf libre.

     

    Malgré tout, malgré cette rondeur assumée et cette incapacité à apprécier l'esthétisme, je pense être coquette. Un peu trop parfois. Parce que les deux choses associées (rondeur et coquetterie) font ressortir cette différence que j'ai cherché à cacher pendant un temps. Une ronde qui sort en robe courte en plein hiver, ou qui n'a pas peur d'afficher ses formes (sans indécence ni vulgarité, j'y veille toujours !) ça surprend ! On attend des femmes rondes qu'elles se cachent sous des vêtements larges, informes, qui les transforment en fantômes urbains indignes d'attirer l'attention.

     

    Je sais que je passe souvent pour la "snob de service". Surtout au travail. Parce que je change de tenue tous les jours, que je coordonne mes chaussures à la couleur de mes vêtements, que parfois je m'amuse à débarquer maquillée des paupières jusqu'aux ongles et que je ne sors jamais sans m'être parfumée abondamment. Vu mon physique, et vu ma nature introvertie, on attend de moi que je sois fade, sans relief, sans originalité. Et je suis tout le contraire. Ca perturbe. Ca fait grincer des dents, quelques fois. Et moi...eh bien...d'une certaine façon, je crois que ça m'amuse.

     

    Et puis, pour être franche, cet accoutrement complète bien le masque que je porte dès que je sors de chez moi... C'est un peu mon uniforme, ma seconde peau, celle que je peux enlever sitôt la journée terminée... Et je crois bien que c'est pour ça que j'y tiens autant !

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  • Commentaires

    1
    Lundi 4 Mai 2015 à 14:41
    Elora

    1m60, taille 40/42. C'est grave docteur ? he  Imagine qu'avant de tomber enceinte, je rentrais dans du 34 (voire du 14/16 ans ! ) alors le jugement des autres, notamment celui de ma mère qui ne comprend pas pourquoi j'ai pas maigri après ma grossesse... Je ne mange pas plus, pas moins bien. Je n'ai pas changé mes habitudes alors perso, j'en ai conclu que c'était mon corps qui ne voulait pas.

    2
    Lundi 11 Mai 2015 à 11:28
    Elora

    Imagine que l'infirmière du collège avait fait un signalement d'enfant en danger ! Et quand elle a vu ma mère, elle était persuadée qu'elle était anorexique ! A rendre fou cette histoire ! 

    3
    Jeudi 14 Mai 2015 à 11:12

    @ Elora : pffff. Comme je l'ai dit dans un autre post, dans mon cas les psychologues scolaires et autres infirmières scolaires à la noix (désolée, je n'ai jamais rencontré une seule infirmière scolaire sympa... je sais *j'espère !* que ça existe mais j'ai été maudite sur ce plan-là !) avaient décidé que mon père était un horrible monsieur qui m'empêchait de sortir, et que ma mère était une grosse dépressive. Je ne sais même pas d'où ça leur est venu. Mais vraiment. Mon père est charmant tout plein, ma mère a juste le tort d'être aussi anxieuse que moi, je ne vois pas comment on peut s'imaginer des histoires pareilles... J'ai découvert que ces horreurs figuraient dans mon dossier scolaire, dans la partie médicale... J'étais allée voir une infirmière pour avoir une dispense pour le sport (en Terminale, histoire de ne pas être notée là-dessus, j'étais tellement nulle que ça valait mieux ! d'ailleurs la madame, grosse comme un éléphant obèse, m'a fait un super speech sur les bienfaits du sport, j'ai failli lui demander franchement si elle avait un jour pensé à appliquer ses propres conseils... au final elle a écouté mon rythme cardiaque, est devenue toute verte et m'a expédiée chez une cardiologue, avec une belle dispense en cadeau... bah oui, elle m'avait tellement agacée que mon arythmie cardiaque, déjà assez élevée au repos, avait doublé d'intensité, lol)... Voilà la madame, échouée derrière son bureau, qui me demande le plus naturellement du monde si "ça va mieux à la maison". Euh. Je lui ai demandé pourquoi ça n'irait pas, et la voilà qui ajoute : "je vois que ta maman avait des problèmes de dépression, c'est fini ?" J'ai cru que j'allais la transformer en steak haché... Et là elle en remet une couche : "Et sinon, ton papa te laisse plus de libertés ?" Euh. Comment dire ? Je crois que cette grosse pintade ne s'est même pas rendue compte qu'elle jouait avec son espérance de vie. mad Je me rappelle lui avoir répondu fort aimablement (hum) que mon père aurait adoré avoir une fille plus sociable, mais que je n'avais tout bonnement pas ENVIE de sortir, et que ça me regardait...

    En fait j'ai appris après coup que ça avait commencé toute gamine, parce que ma chère tante, qui ne pouvait pas encadrer ma mère (issue d'un milieu plus modeste que la famille paternelle, visiblement ça posait problème...) avait fait un signalement à la DDASS. Lequel signalement était resté sans suites, jusqu'à ce que ma mère, qui était nourrice agréée, aille signaler elle-même que le bébé qu'elle gardait était maltraité (pas battu, mais mal nourri, mal soigné, bref la grosse joie !)... Non seulement les assistantes sociales n'ont rien fait pour ce bébé, mais en plus elles ont dû retrouver le signalement, et elles se sont intéressées de près...à ma mère, notamment parce qu'elles me trouvaient "trop réservée" (je devais avoir deux trois ans, à peine)... N'importe quoi ! Du coup elles venaient toutes les semaines, à l'heure du café, et ma mère qui tremblait à l'idée qu'on lui reproche quelque chose et qu'on en profite pour me confier à ma tante, leur servait le café et les petits biscuits. Ca a duré quelques mois, jusqu'à ce que mon père en ait marre et "oublie" d'attacher le Berger Allemand. Lequel Berger Allemand était d'ordinaire très gentil, mais a du sentir que les greluches n'étaient pas les bienvenues chez nous. Il les a accueilli en grognant et en aboyant, elles ont fait marche arrière et...ont disparu de la surface. Elles n'ont jamais rappelé, ne sont jamais revenues. En fait elles avaient juste trouvé la bonne poire et profitait de l'occasion pour déguster café et biscuits. Et quelque part j'imagine que ça les amusait un peu d'abuser de leur "pouvoir" !

    A côté de ça j'ai croisé pas mal de gamins qui avaient de vrais problèmes familiaux... Notamment en primaire, une copine qui était battue par son père, et dont la mère était alcoolique (la pauvre femme devait se raccrocher à sa bouteille pour supporter le mari...)... Bah... Là, tout le monde s'en fichait, bizarrement !

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